Un petit hommage à la créativité des illustrateurs et des auteurs pour la jeunesse

Hé quoi... il nous fallait bien un prétexte pour rester de grands enfants.

lundi 18 octobre 2010

Le Murmure des dieux (Roxane-Marie Galliez et Cathy Delanssey)

Cet ouvrage est une sorte de tour du monde des mythologies. Il est divisé en quatre parties (la création du monde, la guerre, l'amour, les héros), précédées d'une prière aux muses et suivies, en guise de conclusion, d'une prière à Ganesha, l'hindou.
Sur une ou deux double-pages sont présentés les dieux et mythologies du monde entier, de la Chine à l'Egypte en passant par la Polynésie, les Celtes, les indiens Pawnees, la Rome et la Grèce antiques, ou encore des légendes africaines, aztèques ou nordiques.
Il ne s'agit pas ici d'un catalogue, on l'aura compris. Ni de prétendre à l'exhaustivité.
Cet ouvrage se présente comme une entrée en matière. Sans historique. Sans arbre généalogique. Sans panthéon ni explications formelles.
Rien que des textes relatant les légendes au fondement de ces diverses mythologies ou des poèmes relatifs à ces mythologies, adaptés avec brio par Roxane-Marie Galliez. L'auteur est titulaire d'un DEA d'ethnologie et d'un doctorat d'histoire des civilisations anciennes, ce qui apporte une sérieuse caution au contenu de l'ouvrage. La poésie et l'art d'écrire de belles choses en plus.

Côté graphique, Cathy Delanssey ouvre un festival de magnifiques illustrations, féériques, presque magiques. Ces dessins complètent admirablement le texte, en apportant ce petit "plus" qui fait que dans certains ouvrages, une part de rêve et de magie sont présents à chaque page que l'on tourne. Pour vous faire une petite idée de ce que la jeune femme est capable de créer, vous pouvez aller faire un tour sur son site.

Ce livre est avant tout destiné aux enfants. Mais n'importe quel adulte intéressé par les mythes, les légendes et l'art ne peut qu'aimer cet ouvrage soigné, qui invite à aller plus loin dans la découverte (ou redécouverte) de ces mythologies, qui sont aux fondements des civilisations et font la richesse des patrimoines culturels.
Un vrai trésor à mettre entre toutes les mains, petites et grandes...

Publié aux éditions Balivernes, Francheville (69), 2007. ISBN : 978-2-35067-020-1.

samedi 16 octobre 2010

Tristan et Iseult (Anne Jonas, Anna et Elena Balbusso)

Ce livre est un trésor. Un très bel objet, rare et précieux. La couverture à elle seule résume le livre, l'histoire, l'émotion. On y voit Tristan et Iseult enlacés, leurs deux corps formant le tronc d'un arbre généreux.
L'intérieur est tout aussi beau. Le livre est imprimé sur un beau papier à grain, épais. D'emblée, on ne peut qu'être séduit par ces riches illustrations, où la violence de certaines scènes n'a d'égale que la beauté des autres. Tout, ici, n'est que mouvement, poésie, délicatesse... malgré l'horreur des scènes évoquées. De ce point de vue, l'une des premières double-page est un vrai chef-d'oeuvre, et permet à l'enfant, y compris à celui qui n'a pas encore accès à la lecture, de saisir toute l'intensité dramatique de la scène qui est en train de se dérouler : Blanchefleur, la soeur du roi Marc, attend, enceinte de Tristan, le retour de son époux. Un cavalier couvert de poussière lui apporte la mauvaise nouvelle de sa mort. Il n'est pas seul : derrière lui se trouve un squelette tenant dans ses mains une faux. Il évoque l'Ankou des légendes bretonnes, celui qui annonce à qui le voit sa mort prochaine. La reine, après avoir donné naissance à son fils, meurt, laissant Tristan orphelin quelques minutes après sa naissance. Sur cette illustration, le drame est bien plus suggéré que montré : on y voit Blanchefleur enceinte, presque prostrée dans la tour du château, les mains sur son ventre arrondi, protectrice. Sur la page de gauche, le cavalier, noir, au visage de cendre, apparaît. Il semble mort lui-même... Tout y est : l'annonce de la mort du roi, mais aussi celle de la reine. Le ciel est noir, le paysage, à l'exception de la tour, n'est que suggéré.

Une partie de la littérature enfantine actuelle revisite les légendes et textes importants voire fondateurs de la littérature. Cet ouvrage met à la portée des enfants à partir de 6 ans la légende immortelle de Tristan et Iseult. Il ne s'agit pas là du texte intégral, bien entendu, mais d'une adaptation. L'histoire elle-même est terrible, c'est celle d'un amour impossible, qui perdure au-delà de la mort. Une légende connue, mise ici à la portée des petits : ce livre les met ainsi en présence du patrimoine de la littérature. Etant donnée la qualité de l'objet, on ne peut que succomber...

Paru aux éditions Milan, Toulouse, 2009. ISBN : 978-2-7459-3431-4.

mercredi 13 octobre 2010

Le Grand voyage d'Ulysse (Françoise Rachmuhl, Charlotte Gastaut)

Le Grand voyage d'Ulysse est un véritable trésor de la littérature jeunesse. Il s'agit d'une adaptation de l'Odyssée d'Homère, pour les enfants à partir de 3 ans. L'ouvrage reprend quelques-uns des épisodes marquants de l'Odyssée, en dix récits plus ou moins longs. Il laisse la parole à Ulysse, qui raconte son voyage à la première personne.

Ce qui est frappant à la lecture du livre, ce sont les dessins. A la première lecture, ils peuvent sembler étranges, voire inesthétiques. Au point que le lecteur adulte peut éprouver quelques difficultés à entrer dans le graphisme, qui puise à la fois dans l'art antique et dans les formes contemporaines. Pour leur part, les enfants accrocheront sans doute immédiatement aux dessins, qui fourmillent de détails. S'il le souhaite, l'enfant peut donc passer de longs moments à explorer les images, avant même de savoir lire le texte : elles en disent sans doute tout autant.
Le dessin est varié d'une histoire à l'autre, mêlant le rêve, la peur, le mythe, l'horreur (la page où le cyclope mange les compagnons d'Ulysse est assez terrifiante), mais aussi l'humour, la beauté des paysages ou du soleil couchant... Dans tous les cas, il est très expressif, presque naïf. Il est également dur, voire violent, en adéquation avec la violence du texte lui-même.

Du point de vue narratif, les textes sont épurés, courts, mais sans concession par rapport à la violence ou la cruauté de l'original. Il n'est pas question ici d'amoindrir la force de l'Odyssée. L'intérêt de cet ouvrage, outre son style graphique étonnant mais en définitive attachant, c'est donc le parti pris de mettre à la portée des enfants un texte aussi exigeant que celui d'Homère. Ce livre prouve, si c'était encore à faire, qu'il n'est pas besoin d'être grand pour apprécier les œuvres de la littérature, de quelque époque qu'elle soit. Tous les textes ne plairont pas à tous les enfants : certains sont difficiles, violents... Mais ce peut être aussi une autre qualité du livre : l'enfant peut entrer dans l'histoire d'Ulysse par plusieurs portes, certains récits étant plutôt à la portée d'enfants de 6-7 ans, d'autres pour des plus jeunes... De quoi alimenter leur soif d'histoires, à lire et à relire en attendant le texte intégral quand ils en auront l'âge. C'est en tout cas un parti pris audacieux que de proposer ce type d'œuvre à de très jeunes lecteurs, à l'heure où la production à destination de la jeunesse prend le parti de les préserver à tout prix de la violence, quitte à aller jusqu'à la nier. Il s'agit ici d'un mythe, celui d'Ulysse, et non pas de la violence gratuite dispensée par le petit écran. Texte et dessin libèrent l'imaginaire bien mieux que ne le fait la télévision. Il n'y a qu'à voir les questions soulevées par les enfants à la lecture de ce livre : il interpelle bien plus qu'un dessin animé, sans les effrayer plus que de raison. Le support lui-même permet en effet la mise à distance, et protège l'enfant de la violence décrite et dessinée, sans toutefois la nier. Le pari semble donc gagné.

Paru aux éditions Flammarion, Paris, 2009. Collection "Les Albums du Père Castor". ISBN : 978-20812-1056-1.

samedi 17 avril 2010

Tita ne dort pas (Stephanie Delmas)



Un soir... les parents de Tita sortent et la laissent à Ato, son grand frère, chargé d'une mission hautement importante: veiller à ce que la petite fille dorme... sauf qu'elle n'y arrive pas! Malgré toute la bonne volonté de son frère, le lait, les moutons à compter ou encore le marchand de sable, rien n'y fait: Tita ne dort pas. Mais au fait, pourquoi ne dort-elle pas? Et si la voie vers le dodo se cachait derrière cette question toute bête?

Derrière un texte simple mais efficace, se cache un vrai petit bijou au niveau illustratif. L'univers de Tita est représenté par des scénettes en tissu, carton et autres, sous forme de clichés, auxquels viennent s'ajouter des dessins traditionnels. Le mélange des genres est très réussi, et même si l'on aurait aimé pouvoir toucher ces différentes matières que l'on devine douces, le résultat reste tout aussi original et agréable. Ce petit livre nous emmène au pays des moutons, des berceuses, des contes, du marchand de sable et autres astuces utilisées pour endormir un enfant, avec un récit alternant humour et poésie, délivrant une vrai ode à l'amour... et au dodo!
A lire sans modération pour les petits... et à faire lire par les un-peu-plus-grands, juste avant d'aller dormir et de rejoindre Tita et Ito dans un autre pays cette fois... celui des rêves.

Les illustrations ci-dessus sont reproduites avec l'aimable autorisation de l'auteur. N'hésitez pas à venir lire quelques extraits sur son propre blog.


Paru aux éditions Carabas, Paris, en 2008. ISBN : 978-2-35100-455-5

mardi 6 avril 2010

Neues aus dem Bahnhof Bauch (Anna Russelmann, Stefan Schultz)

Dans une caverne chaude et douillette, habitent une nuée de petits bonshommes verts, les enzybars. Ils ne mènent pas une petite vie tranquille, mais travaillent sans relâche pour débiter en petits morceaux la nourriture qui tombe du plafond et la charger dans les trains qui l’emmènent ensuite plus loin pour être traitée.

Le travail des enzybars n’est pas toujours facile, en particulier lorsque de trop grandes quantités de nourriture arrivent d’un seul coup. Des montagnes de travail – au sens propre! – s’accumulent et, si en plus les aliments ont été avalés sans avoir été mâchés, les enzybars risquent de sérieuses commotions lorsqu’ils reçoivent de gros morceaux sur la tête. Soudain les enzybars en ont assez et se mettent en grève! Ils manifestent en hurlant, agitent des banderoles et frappent contre les parois. Voilà le mal de ventre qui guette le gourmand!

Si les explications données concernant le fonctionnement du système digestif ne sont pas toujours très scientifiques (les gargouillis d’estomac quand on a faim seraient dus aux ronflements des enzybars qui dorment faute d’avoir du travail à faire), ce livre devrait plaire aux enfants et les inciter à prendre de bonnes habitudes alimentaires. Les illustrations en particulier sont pleines d’humour et aident à se rappeler facilement quels sont les aliments à éviter (les oursons en gomme sont tellement élastiques qu’ils en deviennent presqu’impossibles à découper ; le coca rend le sol, les murs et le plafond tout collants et empêche les enzybars de travailler sans une combinaison de protection spéciale…) et les aliments à préférer (les petits pois sont super marrants: les enzybars s’en servent comme ballons-sauteurs). En bref, un livre qui plaira aux petits enfants comme aux grands!

Paru aux éditions Michael Neugebauer Verlag, Gossau, 2007. ISBN 3851955382
En français: GARE DE L’ESTomac. Paru aux éditions NordSüd, Zürich - Paris, 2007. ISBN 3314209533

lundi 5 avril 2010

Danseuses du Monde (Aurélia Hardy, textes ; Sybile, dessins)

Et si nous partions faire un tour du monde ? Oui mais attention, pas n’importe quel tour du monde… un voyage un peu particulier où l’on irait découvrir les danses typiques d’une région… où une petite danseuse viendrait nous présenter son style de danse, ses caractéristiques et son origine… où elle partagerait avec nous ces moments de grâce et de passion… où elle nous donnerait envie de les accompagner… Alors, ouvrez ce livre et laissez-vous emporter par les différents rythmes.

Chaque double-page de ce livre est consacrée à une danse, expliquée par une jeune fille qui nous fait rentrer dans son univers d'abord en présentant la danse qu'elle pratique, puis en nous faisant vivre ses émotions lorsqu'elle se produit sur scène. Si toutes les danses ne sont évidemment pas représentées, ce livre a le mérite de présenter des genres connus, comme le rock américain et la valse viennoise, tout comme des danses plus typiques et moins connues, telles que celle d'une tribu africaine ou des danses folkloriques polonaises, sans poser la moindre hiérarchie entre elles.
Les illustrations sont simplement magnifiques : elles forment de véritables tableaux, parfois sur deux pages, parfois plus (certaines se déplient) qui emmènent au rêve et donnent vie au texte lorsque celui-ci manque d’un peu de personnalité et d’émotion. Mentions particulières aux tableaux dépeignant les danses russe, avec la Place Rouge et ses matriochkas enneigées, japonaise avec ses paravents, orientale avec son moucharabieh ou encore andalouse avec les drapés d'une robe superbement rendus...
A mettre entre les mains de personnes amatrices de danse ou de jolis livres.

Si vous souhaitez voir quelques pages du livre, n'hésitez pas à aller visiter le site de Sybille et découvrir son petit univers.

Paru aux éditions Auzou, Paris, en 2009. ISBN : 2733812068